jeudi 13 novembre 2008

Hoppi's world - Chapitre 1

Première spire

1
Chien de matin

Rai sournois de lumière qui brûle la paupière endormie. Ronflements persistants qui bourdonnent à l’oreille frémissante. L’air impur de la nuit écœure les narines silencieuses. Chien de matin.
Tout ça n’est qu’une vaste fumisterie ! La chaleur de la couche ne dure qu’un temps. Les membres sont engourdis, l’organe est mort. Je tente alors un mouvement et le drap m’accompagne : sa caresse fait trembler les chairs encore somnolentes. L’Autre ne bouge pas, ses vrombissements déchirent le silence de l’aurore. Je me penche alors pour observer son visage. Sa pâleur lui donne des airs de cadavre. Certes, le moribond ne manque pas de coffre. Je me rapproche encore. Enivrées par le parfum de la peau, mes lèvres s’émeuvent malgré moi. Un cri imperceptible s’échappe même de ma bouche. Une main se met alors en branle, et cherche doucement la mienne. L’impertinente me conduit vers un territoire déjà trop exploré. Je me décide enfin à susurrer quelque mot doux, un get out fera bien l’affaire : il suffit d’y mettre le ton.
L’Autre pense d’abord avoir mal compris, Il plonge son regard vitreux dans mes yeux fatigués de le voir. Quelle impudence ! Il cherche même à coller sa face livide contre la mienne. Je tressaillis au contact de sa bouche suintante et me décide à employer de moins douces méthodes. J’aperçois au coin du lit des frusques bigarrées : elles exhalent le parfum nauséabond de la cigarette de la veille. Je ramasse les immondices et les lui jette au visage. « GET OUT ! »
Cette fois, l’Autre comprend, me chante la fucking melody de l’amant éconduit et prend la tangente.

***

Espérons que la douche me débarrasse de toute cette crasse, physique et mentale. Mais l’eau de Paris semble avoir perdu ses vertus purificatrices : je sors de la baignoire encore souillée de désillusions. L’infâme sonnerie du téléphone m’arrache à mon désarroi :
« Oui ?
- C’est moi, le rendez-vous est pris pour quatorze heures, tu pourras venir pour m’aider à choisir ?
- Prends la blanche…
- Pfff…. parfois, j’ai vraiment l’impression que t’en as rien à foutre ! »
Cécile tente un peu plus chaque jour de m’impliquer dans son projet. Les purs dans la dentelle et les impurs dans la fosse à purin, il va bien falloir comprendre un jour. J’hésite un instant et réponds à la mariée en colère :
« ÉCOUTE, j’ai un entretien dans une demi-heure, c’est tout… Et puis on se voit à midi non ?
- Très bien, je te laisse, à toute ! »
Je raccroche le téléphone d’un geste las. Grotesque Dora Maar, j’aperçois mon reflet brisé dans le miroir de l’entrée. Après m’être perdue quelques secondes dans la toile glacée, je constate une chose : le cynisme ne me sied pas au teint.

3 commentaires:

christine a dit…

en revanche ton texte est formidable!

Anonyme a dit…

Tu as une belle palette de mots, on sent bien les études du français et de ses racines. C'est super aussi de voir le texte et l'image côte a côte. C'est là que tu vois que l'image et les mots n'ont vraiment pas le meme pouvoir pour dire la meme chose!

A.L. a dit…

merci les miss,
je vais néanmoins tenter de moins charger les prochains textes (et gommer l'aspect trop scolaire peut-ê). Je suis contente en tt cas que vous ayez pris le temps de le lire ! merciii